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...musiques obscures, funèbres, oniriques et dépressives ...
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DARK, BLACK AND HAUNTED SOUNDSCAPES

DARK, BLACK AND HAUNTED SOUNDSCAPES
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OLHON

SONGS FROM THE DEPTHS…

Né en 2001 de la collaboration fructueuse entre Massimo Magrini (Bad Sector) et Zairo (Where), OLHON explore les profondeurs ténébreuses des caves, lacs, et autres lieux inexplorés et lacustres à partir d’un impressionnant et angoissant travail de field recordings…
Zairo : on-site recordings, treatments
Massimo Magrini : treatments, final mix

VEIOVIS
(Spectre – Nautilus) 2001


1- Untitled 1
2- Untitled 2
3- Untitled 3
4- Untitled 4
5- Untitled 5
6- Untitled 6
7- Untitled 7

Suite de ténébreuses plongées aux fonds de lacs volcaniques italiens (Lago Boracifero, Lago Scuro…) reconnus comme d’anciens lieux de cultes préromains, « Veiovis » est une immersion totale dans ses profondeurs glacées, claustrophobiques, en témoigne le terrible et abyssal premier morceau, fait de grincements, de grondements, de craquements sur la gangue de métal recouvrant le micro parfois plongé à plus de deux cents mètres. On sent la pression terrible, la noirceur de cet univers inconnu. Les souffles inquiétants ainsi recueillis se combinent en une mélodie spectrale, exhalaison hantée, née de ces noirs abîmes. Car aucun synthé n’intervient ici, les sons - et c’est ce qui est fascinant à un tel degré - ne sont que mixés et non réellement modifiés, mais ils réussissent à créer un véritable morceau – longues nappes bourdonnantes, bruits incongrus, persiflant, lointain écho hululant dans les profondeurs, le tout ponctué - rythmé - par des grondements terribles. Le second morceau est tout aussi impressionnant. On sent ici toute la noirceur, la face cauchemardesque des albums de Where avec « Creatures of the Wind » et « Wererat ».
En revanche, le troisième morceau, même s’il reste ponctué d’échos bourdonnants et distants, exprime plus la part onirique, irréelle de Bad Sector. C’est comme si l’on remontait pour un instant à la surface, atteignant une grotte baignée par une lueur magique, nous révélant quelques royaumes engloutis… plein de colonnes festonnés de corail… de statues de dieux morts et oubliés depuis longtemps…
Puis l’on replonge avec le morceau suivant dans les ténèbres, la pression nous écrase de nouveau, fait gémir la structure de notre submersible, et des choses cognent contre la coque, agitent à l’extérieur leurs formes improbables…
Le cinquième morceau est d’une facture plus « classique »mais toujours aussi porteur. Sorte de lente noyade rituelle, suffocante, qui nous rappelle certain passages d’un autre album sorti chez Nautilus : « Aquanaut » marquant les débuts prometteurs de Kraken. Et toujours aussi loin d'un certain minimalisme comme on pourrait le croire, cette œuvre foisonne de sonorités, de chuchotements évanescents… et chaque plage est une nouvelle descente.
Quant au dernier morceau il retrouve cette sorte d’ivresse des profondeurs que l’on avait dans le troisième morceau, mais avec une plus grande part d’obscurité, qui va crescendo, encore une fois très proche des œuvres de Bad Sector.
Un grand premier album, résolument voué à ne plaire qu’à de très rares auditeurs, mais terrible, beau, envoutant… et rare… comme quelques créatures des abysses…

SINKHOLE
(Eibon Records) 2006



1- Descent
2- On sea Level (- 70 m)
3- Olhon Sounding-Line (-91 m)
4- Speleosub (-100 m)
5- R.O.V. Mercurio (-210 m)
6- Hiball 300 R.O.V. (-310 m)
7- R.O.V. Prometeo (-392 m)
8- Groundless (-400 m)
9- Deeper
10- Unexplored

Seconde immersion angoissante avec cet album qui nous plonge dans les profondeurs du « Pozzo del Merro », trou d’eau ou « sink-hole » qui ne semble pas avoir de fond…
Chaque morceau ayant été réalisé à une profondeur spécifique allant jusqu’à - 400 mètres, nous commençons donc la plongée avec « Descent ». La pression devient de plus en plus forte, elle nous étouffe lentement, des claquements retentissent, des bruits indéfinissables nous parviennent, déformés par l’eau, pas de doute, nous sommes en route pour un monde étrange.
Avec « On sea Level (- 70 m) » c’est tout un univers grinçant, bourdonnant, plein d’échos qui se révèle à nous. Et si une lueur perce encore, c’est n’est plus qu’un lointain ectoplasme, un ondoiement blafard qui nous révèle des formes troubles, des remuements inquiétants, tout un tas de choses qui se déplacent à la limite des ténèbres.
Et avec « Olhon Sounding-Line (-91 m) », il n’y a plus que des grattements, des chuintements, des claquements assourdis, avec ses hululements imprécis qui rythme le morceau. Et la descente se poursuit, toujours aussi claustrophobique, délaissant à présent toute clarté, n’utilisant plus les harmonies oniriques que l’on trouvait ici et là dans « Veiovis ».
Tout devient échos avec « R.O.V. Mercurio (-210 m) », les voix, les sons, le moindre bruit se déforme, disparait, revient, avec toujours, en arrière ce grondement d’abysse qui va et vient au gré de courants secrets.
Les morceaux sont toujours aussi hantés, à témoin « Hiball 300 R.O.V. (-310 m)» ou « R.O.V. Prometeo (-392 m) » qui transforment ces profondeurs en véritable au-delà. Et au fur et à mesure de la descente, les sons se font de plus en plus indiscernables les uns des autres, ils forment un tout mouvant, une texture riche et en constante mutation.
« Groundless (-400 m) » ne fait pas exception à la règle, sorte de souffle hanté, imprécation inquiétante née dans les profondeurs de ce trou d’eau.
En revanche « Deeper » se révèle moins riche au début ; sorte de long vrombissement sur lequel les mêmes sons feutrés s’ajoutent un à un en des boucles lancinantes. Et « Unexplored » clôture ce voyage avec ses cliquetis, ses lentes remontées de sons étouffants.
Pour tous ceux qui gardent un mauvais souvenir de leur première descente en batiscaphe, de leur premier voyage en sous-marins…

UNDERWATER PASSAGE
(Eibon Records) 2008


















1- Entrance
2- Underwater Calls I
3- Underwater Calls II
4- Exit

Cette fois-ci Massimo Magrini et Zairo ont accroché leur micro à une ligne téléphonique abandonnée, quelque part au sud de Livorno, en Italie, le laissant courir à une profondeur d’une quarantaine de mètres et recueillant ainsi toutes sortes de bruits, de fréquences modulées puis démodulées en studio, obtenant de la sorte un large spectre de fréquences.
Après les curieux bourdonnements de fréquences de la courte introduction (Entrance), c’est un long morceau de plus de vingt minutes qui commence.
« Underwater Passage » se révèle d’emblée beaucoup moins oppressant que les deux précédents albums.
Avec « Underwater Calls I » c’est une lente immersion dans un univers calme, mystérieux, plein de bruits intemporels, de fréquences qui traversent l’espace avec la grâce de quelques créatures des grands fonds, et même s’il demeure une part de crainte, elle reste en arrière-fond, voilée par l’étrangeté de cette exploration. Nous avons quitté les trous d’eau obscurs, suffocants, nous sommes en pleine mer, et s’il y a de la vie, on la sent aussi moins menaçante.
On est ici plus proche de l’œuvre de Bad Sector que celle de Where. Boucles oniriques, drones aériens, échos bourdonnants, vibrations qui se perdent dans l’espace, tout est là pour nous faire rêver. Certes, ces travaux oniriques, quoique réussis, me semblent moins fort que les deux superbes morceaux du même style qui figuraient sur « Veiovis » (Untitled 3 et 7), mais ici l’espace se délaye, c’est une douce rêverie qui en résulte, et non l’enchantement ressenti sur le premier album.
Le morceau suivant « Underwater Calls II » commence par une succession de craquements rapprochés qui se perdent en résonances, en réverbérations, puis une mélodie grave, bourdonnante, en arrière-fond, fait son apparition. Tout s’amplifie, devient vibration, drone oscillant. Les sonorités se succèdent, se confondent, parfois presque expérimentales.
Et c’est un compromis entre les anciens albums et la face plus enchanteresse d’Olhon qui nous est offert. Mais là encore, même si l’ensemble reste agréable, on est loin de l’effroi de l’un ou de la beauté de l’autre.
« Underwater Passage » semble être un album transitoire, sorte de pallier de décompression marquant une pause, menant à autre chose… mais vers quelle cité engloutie ou vers quel nouveau cauchemar ?
…A suivre…

LUCIFUGUS


A- Homo Lucifugus
B- Vox Lucifuga

Tout simplement génial ce nouvel album d’OLHON… A ceux qui doutent encore de la puissance évocatrice du field recordings, des invocations spectrales dont un micro placé en un lieu stratégique est capable, Lucifugus est l’album qui balaiera leurs doutes d’un écho gémissant de son, d’un grattement douloureux de branche, à minuit, sur le métal rongé d’une cuve.
Car cette fois-ci, Massimo Magrini et Zairo ont plongé leur micro dans une série de vieilles cuves rouillées, au milieu d’une forêt, et ont commencé l’enregistrement par une nuit venteuse de septembre finissant…
Le travail de recherches sonores des deux comparses atteint ici un niveau rarement atteint par le passé. Les sons y sont d’une pureté, d’une profondeur, d’une étrangeté incroyable. Véritables mélodies gémissantes, douloureuses, profondes et terrifiantes ; certains sons, remplaçant ici les nappes de synthés, forment la base de cette face A ; ils s’étirent, geignent, tournoient de façon indéfinissable, d’une beauté fantastique et sinistre, au-delà de ce que toute machine aurait pu produire. Homo Lucifugus ouvre à lui seul les portes d’un univers spectral, inquiétant, car tous les sons issus de cet enregistrement nocturne sont à la fois troublants et dérangeants, du moindre craquement, aux échos bourdonnants, aux gémissements irrités du métal.
Suit la face B, avec le tortueux Vox Lucifuga. Ici les grincements, les échos meurtris prennent le pas sur les mélopées gémissantes de sons. Vox Lucifuga est à lui seul une bande son horrifique, et ne lasse pas de faire penser aux vers de Lovecraft :
I ‘am the voice of mother Earth,
From whence all horrors have their birth.
Car c’est de l’horreur, du mystère, de l’étrangeté de la vie, de l’existence, de l’univers et de la matière, dont il est ici question. Et si les croyants de toutes confessions lisent la vérité dans des livres qui ne sont, en définitive, que des légendes de plus dans la grande histoire sordide de l’humanité, qui aurait pu dire qu’il suffisait de plonger un micro au fond d’une vieille cuve pour savoir à quel point la nuit est noir et la lumière illusoire…

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