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Prochains articles :MORTESIUM...INVERCAULD...KAMMARHEIT...
...musiques obscures, funèbres, oniriques et dépressives ...
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DARK, BLACK AND HAUNTED SOUNDSCAPES

DARK, BLACK AND HAUNTED SOUNDSCAPES
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CAUL (II)

CAUL OU LA MYSTIQUE DOULOUREUSE
2ème Partie (2002-2013)
1ère Partie (1994-2001)



MUEIN
(Underground, Inc.) 2002


1- Muein

.

Véritable chef-d’œuvre noir et susurrant, œuvre spectrale et dérangeante s’il en est, comme « Hidden », « Muein » est un long morceau qui étire son mal être, sa noirceur, sur près d’une heure.
Et il est une constatation qui s’impose à l’écoute de ces longs titres, c’est qu’ils sont d’emblée beaucoup plus sombres que les autres albums, que toute trace de quiétude, tout ce côté éthéré de l’œuvre de CAUL disparait au profit d’atmosphères spectrales, sombres et presque dépressives à certains moments. Déjà avec « Whole », CAUL nous entrainait dans un royaume obscur et tourmenté, puis venait le plus introverti et presque douloureux « Hidden ».
« Muein » ne fait donc pas exception à la règle. Et si la musique de CAUL est l’expression de la relation de Brett Smith avec Dieu, elle semble parfois bien mortifiée. Ou bien est-ce sa manière d’exprimer le mystère divin, de l’appréhender avec des ambiances noires et cosmiques, un peu à la manière de Gustaf Hildebrand et de ses Starscapes ?
Mais il est temps d’écouter, voilà les premières mesures, sonorités gémissantes, distordues, qui s’étirent dans un mélange de vrombissements lointains de cloches, d’échos transperçant parfois le voile opaque de couches superposées de sons. Et toujours ce son à la limite du sifflement, de la distorsion, qui revient dans le flou sonore. Puis au bout de quelques minutes, tout se fond dans une suite de vibrations, de notes persiflant, et les drones recouvrent tout.
Et tout recommence, comme si on abordait sur un autre rivage désolé, une nouvelle contrée triste et crépusculaire. On entend un lointain ressac, des drones sournois agitent parfois l’air, et toujours les mêmes sons fébriles, pernicieux, qui s’éternisent, se transforment, se perdent dans le flux et le reflux de cet océan sinistre. Ce n’est pas le paradis qui est ici évoqué, mais une sorte de Purgatoire sans fin, une terre grise où errent les âmes torturées des vivants.
CAUL joue tout le long de l’album avec ses sonorités mauvaises, frémissantes, à la limite de l’aiguë et de la vibration (… ?) qui ont véritablement quelque chose de glauque et de hanté. Les « mouvements » se suivent, tous aussi sombres, expressions d’une nuit solitaire au bord du Styx. Parfois les sonorités enflent, débordent, expurgeant toute la noirceur, la souffrance qui les animent. Des voix sourdent en chœurs du néant grisâtre, agitent leurs spectres imprécis sur la toile de fond d’une existence à bout de souffle (39’00)… Impressionnant…
A mon sens plus convaincant que le trop discret et pourtant très riche « Hidden », « Muein » a quelque chose de sombre et de désolé, un je ne sais quoi de terriblement désespérant dans les harmonies, le choix de sons, qui en fait un parfait album de dark-ambient, album qui étend les perspectives créatrices de Brett Smith au-delà de son spectre habituel.
A tous ceux qui recherchent les ambiances noires et hantées, à ne rater sous aucun prétexte…


SWAN
(Epiphany Recordings) 2003


1- Abyss of the Infinite Light Divine
2- Darkness
3- Kibroth Hataavah
4- Soul Rising Out Of The Vanity Of Time
5- Strength According To The Word
6- The Garden
7- The Nereids
8- The Vettar
9- Trickle

« SWAN » est un agréable retour à la grande période de CAUL (Crucible, The Sound of Faith, Light from many Lamps et Reliquary). Sortis entre 1996 et 2001, tous les morceaux, à l’exception des pistes 7 et 8 inédites à ce jour, proviennent tous de compilations épuisées. A noter qu'ils sont aussi des versions légèrement alternatives de certains morceaux existants déjà en CD.
Tiré à seulement 50 exemplaires, le CD a le mérite de s’adresser aux fans, à ceux qui veulent fouiller l’ensemble de la discographie riche de CAUL, et désespèrent de trouver toutes ces compilations et raretés. De plus, l’album a longtemps été disponible en téléchargement libre (et le sera sans doute de nouveau un jour) sur le site de Brett Smith.
Après la brume, la grisaille neurasthénique de « Abyss of the Infinite Light Divine », on (re)découvre le très beau « Darkness », (Crucible) mélange de sonorités profondes, de souffles, et de mélodies sombres et annonciatrices de quelques tragédies.
« Kibroth Hataavah » est un titre à l’atmosphère menaçante : drone en arrière-fond, sonorités sourdes exprimant quelque mal exotique (sorte de trompe caverneuse) et tintements monotones.
« Soul Rising Out Of The Vanity Of Time » déjà présent sur le très bon « Reliquary » en une version légèrement plus courte.
« Strength According To The Word » commence par un piano pesant, puis des mélodies flutées apparaissent, soutenues par les harmonies profondes d’un synthé.
« The Garden » poursuit l’enchantement, avec ses chœurs, sa harpe, ses voix féminines... Véritable voyages aux jardins des Hespérides où en quelque île merveilleuse de l’autre monde.
Premier morceau inédit, « The Nereids » évoque avec ses voix moribondes, ses nappes pesantes de synthés, un voyage mystérieux, une odyssée dans une région pleine de brume et de créatures dont on n’entend que les gémissements lointains.
On reste dans la même ambiance, les mêmes mélodies troubles avec « The Vettar », percussions en plus et voix en moins.
Lent, funèbre, « Trickle » se perd dans une triste contemplation et termine se CD sur une note plutôt sombre.


NUMINA/CAUL
INSIDE THE HOLLOW REALM
(Gestaldt Records) 2004



Collapse of the Spiral Spire
1- The Wind Speaks
2- Night Sky Darkens
3- The Gathering
4- Uncertain Moment
The Molten Void
5- Descent into Darkness
6- Serpent Sounds
7- A Brief Reprive
8- Molten Flow
A Distant Past Fades
9- Aphasia
10- The Seer
11- Withdrawn
12- The Memories Blend



Après les ténèbres des précédents albums, Brett Smith retrouve un peu de lumière avec l’aide de Jesse Sola et de l’ambient plus légère de NUMINA.
« The Wind Speaks » est un joli morceau à l’ambiance féerique, aux mélodies calmes, rehaussées par des percussions qui nous plonge tout de suite dans l’atmosphère irréelle de cet album voué à la nature, à l’évocation de ces merveilles, d’un instant précis qui s’étire à l’infini et se pare de mystère.
« Night Sky Darkens » a quelque chose de cosmique dans le tournoiement des sons, et si le ciel nocturne s’enténèbre, ce n’est pas avec l’angoisse de la nuit, mais comme une sorte de révélation magique. C’est la beauté de l’instant qui est célébré.
Après le plus fade « The Gathering », « Uncertain Moment » renoue avec les percussions, les nappes planantes de synthés, évoquant tour à tour bon nombre de noms de l’ambient comme Alio Die, Vidna Obmana, Robert Rich, Thom Brennan ou Oöphoi. Le morceau gagne en mystère dans sa seconde partie, lorsqu’il ne reste plus que des nappes cristallines de synthés, des tintements lointains.
« Descent into Darkness » ne porte en lui qu’une bien faible part de ténèbres, si ce n’est dans les tourbillons incessants de sons, sorte d’effet wah-wah/distorsion qui se mêle à une brume sonore imprécise, ainsi que quelques percussions ; et il faut bien admettre qu’il ne décolle jamais vraiment.
« Serpent Sounds » est plus proche de ces tourbillons imprécis de sons, distants, fantomatiques, qui évoquent un mystère profonds, un lent éveil à la beauté de la nature. Des sonorités qui ne sont que le reflet des brasillements de la lune à la surface d’un lac.
On retrouve la même magie dans « A Brief Reprive ». Sonorités cristallines, nappes éthérées et calmes, le morceau s’élève à la hauteur des meilleurs morceaux de Thom Brennan dont, finalement, « Inside the Hollow Realm » se rapproche le plus.
Tout aussi calme et rêveur, « Molten Flow » termine cette seconde partie.
« Aphasia » sert d’ouverture au troisième mouvement : A Distant Past Fades. Enchanteur, mystérieux, « Aphasia » est aussi empreint d’un onirisme puissant qui pousse l’esprit à partir à la recherche de quelque cité lointaine et inatteignable des contrées du rêve.
« The Seer » et « Withdrawn » ne déparent en rien cette quête onirique intérieure, ici les mélodies s’effacent, les sons se dispersent dans l’éther, ne laissant derrière eux que de curieuses effluves.
Le mirifique « The Memories Blend » clôt en beauté ce CD dans une communion, une parfaite osmose de sonorités mystérieuses et enchanteresses.
Un bel album qui rompt avec la noirceur tourmentées des derniers opus et qui, même s’il n’atteint pas ce mélange si particulier de mysticisme, de douleur et de hantise des premières ouvres, a le mérite d’ouvrir les portes d’un royaume enchanteur.


APOPHASIS
(Dark Winter) 2006 MP3 file


1- Apophasis


Présenté de la façon suivante : Apophasis is "negative theology"- a view of God determined by defining what God is not. Ce nouvel album nous éclaire un peu sur la noirceur mystique de certains albums de CAUL. Tout le pessimisme, la désespérance, la grisaille et le côté spectral de certaines œuvres sont en fait une sorte de contre performance, l’expression de tout ce qui n’est pas Dieu, donc de tout ce qui appartient au royaume des ténèbres.
Après le superbe et long morceau « Muein », lourd de noirceur, « Apophasis » s’affirme comme un travail sur une ambiance alternant grisaille et irisations, une œuvre tout en demi-teinte, rêveuse et triste, belle et souffrante, mystérieuse et hantée…
Dans les premières minutes, les sons demeurent sourds, proches de l’exhalaison, sorte de souffles funèbres et discrets, jusqu’à l’arrivée de sonorités plus oniriques : voix noyées dans les souffles, les drones imprécis, puis tout redevient sombre. Des sifflements, de curieux bruits, des bruissements diffus de sons, de notes profondes, envahissent l’espace en une sorte de lente procession spectrale, monotone, triste, inquiétante et pouvant parfaitement convenir à la visite de n’importe quelle maison hantée.
Vers la quatorzième minute une pause s’installe, puis les bruits étranges reprennent, les souffles et les notes caverneuses refont surface avant de laisser leur place à des martèlements et des notes flûtées, tout en réverbérations, qui naissent et meurt les unes après les autres dans cet espace glacé. Il ne reste bientôt plus que ces notes fantomatiques, perdues dans un arrière-fond sonore mouvant. On pense à certains morceaux de Lustmord, de Lull, mais ici les ambiances restent fortes, ne lassent jamais, ce qui n’est pas toujours le cas des artistes cités.
Et on sent que jusqu’au bout, il nous faudra rester dans ces demi teintes grisâtres, ce Purgatoire nauséeux, traversé de formes fugaces, d’ombres désenchantées, et où ne brille jamais autre chose que le fard livide d’astres à l’agonie. Quelques relents de lumières viendront bien ici et là tacher ces ténèbres, mais ils sont fugaces, toujours empreint de tristesse, d’une mélancolie profonde, et de cette impression récurrente d’évoluer dans un entre deux mondes spectral.
Sans doute moins marqué que « Muein », « Apophasis » n’en reste pas moins une œuvre vénéneuse, à la beauté mortifère.

« Apophasis » est en téléchargment libre (et légal...) sur le site de DARK WINTER parmi une foule d'autres albums...


CAUL & KIRCHENKAMPF
SLEEP – NIGHT – DEATH
(Malignant Records) 2008


1- And the First as a Shadow
2- Darkness and Water
3- I’ Am the One Whom You Have Hidden from
4- Pit of Stars
5- The Abyss Will Appear Among Your People
6- The Consumation of the Voice of Blood
7- We Enter Fire Imbibed

Brett Smith poursuit lentement mais sûrement son chemin, sa propre voix musicale, sortant les unes après les autres des œuvres personnelles, tour à tour envoutantes ou terrifiantes, mais qui ont une constante : la qualité. Après « Inside the Hollow Realm », voici donc une nouvelle collaboration de CAUL, cette fois-ci avec KIRCHENKAMPF, projet de l’américain John Gore pourvoyeur d’ambient expérimentale depuis de nombreuses années.
Et justement, « Sleep – Night – Death » pourrait bien être la face obscure de la précédente collaboration avec Numina. Certes, on n’atteint pas ici les sommets – ou les abîmes – de noirceur des dernières productions de Brett Smith en solitaire, mais l’album comprend suffisamment de zones d’ombres pour mériter son appellation dark-ambient…
« And the First as a Shadow » annonce déjà la couleur. Peu de lumière viendront percer la surface de ce royaume nocturne menant à la mort. Tout aussi impressionniste que les précédentes productions de CAUL, ici les synthés sont omniprésents, mais les sons se perdent malgré tout dans un brouillard de sonorités, de bruits indéfinissables, les mélodies se dissolvent dans les ténèbres. L’ambiance est largement au rendez-vous, inquiétante, étrange, évocatrice de rêves porteur de mort. Car si dans les ténèbres de la nuit, le sommeil est une mort quotidienne, on en prend ici pleinement conscience.
« Pit of Stars » a quelque chose de plus onirique encore, à la limite du rêve et du cauchemar, de cet état imprécis qui précède l’endormissement et semble déjà brouillé par les rêves. Hypnagogique comme l’est l’œuvre d’Onirot par exemple, ni d’un univers, ni de l’autre, mais oscillant entre les deux selon nos errances intérieures.
« We Enter Fire Imbibed » tient plus du mauvais rêves, on sent que de ce sommeil, de cette nuit, la mort pourrait bien résulter. Les nappes de sons se superposent, des mélodies lugubres et fragiles émergent des ténèbres du dedans, les notes s’étirent, des souffles, des bourdonnements viennent envahir notre sommeil paradoxal, nous tirant de plus en plus vers l’abîme.
« I’ Am the One Whom You Have Hidden from » débute comme une bande-son fantastique, bruits angoissants, sonorités lourdes et porteuses d’une menaces que l’on sent proche, mélodies planantes mais sournoises, qui agitent leurs remous au plus profond de notre sommeil.
Très réussi aussi, « The Abyss Will Appear Among Your People » est tout aussi fantastique, fantomatique, porteur de mauvais présages et de rêves troubles. Lent déploiement mouvant de sons, de souffles, de voix étouffées, où surnagent un instant des notes inquiétantes. Pour ceux qui n’ont jamais vu, même en rêves, la lisière de l’autre monde… Laissez vous porter par les sons… les fantômes viendront jusqu’à vous…
Presque plus lumineux, en tout cas mystérieux, « Darkness and Water » poursuit ce cauchemar, ce demi rêve étrange, qui rappelle décidemment bien certains moments de « Muein », « Apophasis » comme certaines des premières œuvres (The Sound of Faith ou Light from many Lamps).
Et c’est dans ces ambiances troubles et sombres que se termine le CD avec « The Consumation of the Voice of Blood », autre morceau se perdant dans un flou de sonorités, de mélodies spectrales, et d’une beauté nocturne.
Remercions Jason et Malignant pour ce nouveau chef-d’œuvre.

Acheter/Buy !!!!!


INVISIBLE LIGHT
MP3 file

Track A
Track B

« Invisible Light » est une courte pièce intemporelle, aux mélodies tristes de piano, aux synthés reproduisant des cordes, qui se rapproche d’une bande originale de film. Un film triste, hors du temps, sur une tragédie dont plus personne ne se souvient.
On pense à Christopher Young (Hellraiser, The Fly II, Haunted Summer…) avec le premier morceau, pas aux orchestrations gothiques, mais à ces courts interludes de pianos qui ponctuent son œuvre (Glass House et Rounders par exemple). Voir un curieux compromis à la fin entre Arcana, Land et différentes bandes-sons.
Le second titre poursuit cette recherche, on songe de nouveau à la beauté nostalgique et fatale de certains morceaux de Land.
Une nouvelle approche de la musique, plus classique, mais tout aussi envoûtante réalisée ici par Brett Smith. Tout en fatalité et nostalgie.

A noter, l'album n'est plus en téléchargement légal sur le site de CAUL pour l'instant.


BBOX
MP3 file

1- Theme 1
2- Theme 2
3- Theme 3
4- Theme 4
5- Theme 5

Dans le même esprit cinématographique, néo-classique, que « Invisible Light », « BBox » en reprend les mêmes attributs : pianos, nappes de synthés nostalgiques, pour les deux premiers thèmes. Puis mélodies oniriques, nonchalantes, pour le troisième et très joli thème.
Le thème suivant reste une sorte de compromis entre ces différentes ambiances, et toujours avec une nostalgie poignante, une aura de tristesse et de douceur qui en émane comme un arrière-goût indéfinissable.
Le dernier thème reste tout aussi simple, et efficace, dégageant la même impression dans la subtilité de ses mélodies de synthés.
Là aussi, plus de téléchargement légal sur le site de CAUL pour le moment !


KAIROS
Aglaia 2009


1- Aglaia
2- Fulgent
3- Tintinnabulary
4- Mirare
5- Quiescent
6- Aery
7- Echolalia
8- Unbeknown

Quelque part entre une version moins électronique de Tertium Non Data, projet parallèle de Brett Smith et John Bergin (C17H19N03), et Blackmouth (mais sans la voix de Jarboe bien sûr) et les productions habituelles de CAUL, auquel il faut ajouté des influences ambiantes marquées, un côté dub assez soft et des rythmiques/percussions omniprésents qui pourraient rebuter les fans pur et dur, mais qui me semble personnellement bienvenue, sorte de parenthèse des plus sympathiques dans le clair-obscur marqué des précédents albums, « KAIROS » reste donc un album à part dans la productions de CAUL.
Le premier titre donne le ton de l’album : notes sinueuses, à la limite du gémissement, de la saturation parfois, percussions, et basses fantomatiques. En fait, le fond sonore propre aux précédentes productions de CAUL, ne change pas, seules les basses, les percussions viennent en relever, en modifier le propos.
Puis les ambiances se suivent, assez proche les unes des autres, avec le presque oriental Fulgent, ou Tintinnabulary et ces sonorités aux très lointaines rémanences ethniques et oniriques comme on en trouve chez Robert Rich notamment, mixés avec ce même mélange de notes diffuses, magiques ou angoissantes, qui composent l’essentiel de l’œuvre de CAUL, avec, bien entendu, le mélange de basses/percussion propre à « KAIROS ».
Suit le presque jazzy Mirare, qui rappelle lointainement, une fois de plus, comme une sorte de souvenir patiné par le temps, la bande originale d’Howard Shore et d'Ornette Colememan pour le chef-d’œuvre de Cronenberg, Naked Lunch ; et on poursuit dans le même registre, ambiance de vielles ruelles brumeuses, de clubs interlopes, de bars enfumés pour Quiescent ou le plus ambiant Aery , dépourvu, lui, de rythmique.
Rêveur, mystérieux, Echolalia où l’on retrouve les étranges sonorités flûtées, à la fois lascives et angoissantes qui ont fait tout le charme des premières productions de Brett Smith.
Retour à l’ambient/dub sournois, au mélange presque gémissant et grinçant de synthés, avec le dernier et très réussi Unbeknown qui va crescendo, acquérant une sorte de beauté rituelle dans ce mélange de rythmes, de synthés, de notes vrillées…
Si « KAIROS » se révèle moins personnel que certaines œuvres précédentes, comme les fascinants « Reliquary » et « Lights from Manys Lamps », ce nouvel album de CAUL a su garder intact la magie qui caractérise l’œuvre de Brett Smith, et ce malgré les rythmes et les basses qui traversent l’album.


POUSTINIA
Aglaia Records, EP, 2009


1- I
2- II
3- III
4- IV
5- V
6- VI
7- VII
8- VIII

POUSTINIA inaugure une longue série d’EP sortis (et à sortir ?) chez Aglaia Records, nouveau micro-label de Brett Smith. Ce premier EP nous propose huit morceaux de musique minimale, mélange d’ambient éthérée, de dark-ambient feutré, et de néo-classicisme discret.
L’ensemble reste simple, triste et fragile, avec cette ambivalence de sentiment propre à CAUL, ce clair-obscur hésitant, incertain, qui fait osciller l’âme entre ici-bas et un ailleurs qui semble bien inaccessible mais dont on entrevoit, pourtant, au hasard de quelques notes cristallines, de quelques mélodies évanescentes, les lueurs instables. Et souvent des voix, lointaines, désolées, comme sur III,  V et VI, nous attirent, nous appellent dont ne sait quelle hauteur insoupçonnable. D’au-delà du mirage.
Certains titres, comme sur le très réussi II ou sur III avec ces lentes mélodies, sorte de comptine éplorée où se perdent des bribes de voix presque fantomatiques, nous rappellent certains morceaux de CRUCIBLE.
POUSTINIA est cet instantané fragile d’une âme qui oscille entre ciel et terre et qui semble se perdre dans la torpeur de ces réflexions, de ses aspirations, de ses doutes, à jamais, en un camaïeu tour à tour grisâtre et lumineux de sentiments contradictoires.


NOIR 
5xfile, MP3, EP, 2010




















1- I
2- II
3- III
4- IV
5- V

Plus rythmé que d’habitude, un peu à la manière de certains titres de HEAVEN’S IN THE GROUND, NOIR propose cinq titre aux lointains accents mélancoliques, certes pas noir, mais parfait pour illustrer quelques scènes plus légères d’un thriller ; l’un de ces instants où le personnage principal erre, seul, perdu en quelques rêveries, quelques doutes secrets, en des ruelles offertes aux caprices de la pluie.
Bien entendu, rien d’extraordinaire ici, les titres sont assez simples, basiques, sans réelles envolées, mais l’ensemble donne lieu à une musique d’ambiance plutôt agréable – même si, il faut bien l’avouer, on a quand même tendance à l’oublier très vite...  
Album en téléchargement légal sur le site de CAUL.
Télécharger NOIR.


UNDER A THOUSAND MILES OF STARS
Aglaia Records, EP, 2010



















1- Dusk
2- Luminary
3- Coronach
4- Vatic
5- Bedim
6- Caliginosity
7- Supernal

Second EP à sortir chez Aglaia Records, UNDER A THOUSAND MILES OF STARS en reprend tous les éléments, la douceur, la tristesse, les doutes, les longues nappes de synthés émaillées de notes de pianos, de voix inaccessibles aux accents douloureux, ce mélange de tristesse et de lumière indissociables, véritable métaphore d’une existence passée au purgatoire à essayer de saisir les lueurs inaccessibles d’un hypothétique paradis.
Si au début les titres sont peut-être moins facilement reconnaissables que sur POUSTINIA, l’impression demeure, ce dualisme éternel, cette quasi certitude d’un ailleurs au fond des larmes. Mais les titres gagnent rapidement en puissance : le magique Vatic, le mystérieux Bedim, l’appel lancinant de Caliginosity
Et puis CAUL c’est l’impression de se tenir au bord du crépuscule, à fleur d’horizon, là où plus rien n’a d’importance que quelques rêves, des souvenirs à demi effacés, des illusions éparses perdues au milieu de lumières à demi éteintes.


HEAVEN'S IN THE GROUND
Aglaia Records, EP, 2011


















1- Dimmet
2- Brume
3- Selva Oscura
4- Macroscian
5- Latitant
6- Smoke
7- Threnody
8- Extirpate

Peut-être plus inégal que les deux précédents EP sortis en CDr, HEAVEN’S IN THE GROUND en reprend pourtant les mêmes éléments, et lorsque cela fonctionne comme sur Macroscian ou Threnody, on se laisse toujours avec autant de facilité prendre par la douceur, par la lumière et les larmes de cette musique intemporelle et calme. En revanche Selva Oscura ou Sinoke apparaissent d’emblée plus faible. Dommage, car loin d’être mauvais, il manque à certains titres comme Lautant ou Extirpate ce petit quelque chose qui permet à l’esprit de s’égarer, de traverser les murs et d’aller regard par-delà l’horizon gris.
On notera aussi le côté plus orchestral de certains titres (Brume, Macroscian, Threnody ou Extirpate).


IN THIS WHITE DARKNESS, WE WILL TAKE THE PLACE OF EVERYTHING
Aglaia Records, File, MP3, 2011
















1- In This White Darkness, We Will Take The Place Of Everything

Après pas mal de temps et d’albums, CAUL revient enfin au dark-ambient avec IN THIS WHITE DARKNESS. Long morceau plutôt discret, volontairement grisâtre, de près d’une heure, et où quelques notes s’étirent, vibrent, se perdent et s’égarent en des spasmes modérés.
L’ensemble n’est pas mauvais, loin s’en faut, mais IN THIS WHITE DARKNESS fait partie de ces morceaux d’ambiances que l’on écoute distraitement et qui, malgré quelques lueurs naissantes, quelques noirceurs soudaines, ne parviennent pas à capter durablement l’attention. Dommage, il ne manquait pas grand-chose, l’essence même du morceau est là ; sans doute aurait-il fallut ajouter quelques notes, quelques bruits de fonds, des drones sinueux, pour donner plus de force à l’ensemble, plus de profondeur au propos.
De plus, le son n’est pas terrible, voire mauvais par moment : forcément, si le format mp3 n’est pas gage de qualité en général, cela semble encore pire pour les musiques ambiantes et industrielles qui jouent sur des sonorités, des bruits, et autres drones et nappes de synthés. Attendez-vous à quelques notes qui vrillent les oreilles...
Album en téléchargement légal sur le site de CAUL.
Télécharger In this White Darkness...


LACUNA
Aglaia Records, File, MP3, 2011















1- Lacuna

LACUNA apparaît d’emblée comme une vision en négatif de IN THIS WHITE DARKNESS. Tout y est plus profond, plus vénéneux, plus étrange, sorte de long crépuscule sans fin qui s’étirerait, indéfiniment, au-dessus d’un monde gris et triste. Et même si, problème inhérent à tout morceau d’une heure, il y a ici et là quelques longueurs, quelques passages où l’attention se distrait et l’esprit s’égare, LACUNA a quelque chose de glacial comme une longue nuit dans les rues désolées d’une ville du nord, dans un novembre pourrissant, quelque part au bord d’une mer sans espoir. Ainsi les quelques instants où la musique se perd en ondoiements étranges, presque surnaturels, nous dédommage largement de ces quelques fadeurs qui, au définitive, ne sont - peut-être - que l’expression de toute cette grisaille qui s’agite devant nos yeux meurtris.
Il y a certaines notes flûtées, mauvaises, qui ont quelque chose de fantastique dans l’âme, comme un conte désolé et maudit de Gérard Prévot. Voire une angoisse irrépressible, fatidique, comme dans certains nouvelles de John Flanders (Jean Ray).
Dommage, une fois de plus, que le format mp3 ne permette de profiter pleinement des instants les plus étranges de ce long morceau…
Album en téléchargement légal sur le site de CAUL.
Télécharger LACUNA.


LET THE STARS ASSUME THE WHOLE OF NIGHT
Hypnos, CD, 2012


















1- Clear Eye Loves the Shadows As Well
2- Radiance Falls
3- Sparkling Snow Is Full of Roses
4- Silent Road to Your Pillars
5- Upon the Vines
6- Just One Autumn for Ripe Songs
7- We Are Like Heartless Shadows
8- Words of Praise Arise, Likfe Flowers
9-  Oblivion and Holy Drunkenness
10- She Is Holy to Those Who Are Lost or Dead
11- Bells Ring Softly in the Twilight Air
12- Kindness of Exalted Night


GREEN IS THE NIGHT AND OUT OF MADNESS WOVEN
Aglaia, CDr/File, EP, 2012




















1- Eventide 
2- White As The Harvest Moon 
3- Brimming With Shadow 
4- Splintered Light 
5- For Glad And Golden Hours
6- A Star That Burned 
7- And So Would I Shine 
8- Four Corners Of Night


LIMINALITY
Aglaia, CDr/File, EP, 2012 




















1- Liminality (Part 1) 
2- Liminality (Part 1) 



LIMINAL
Aglaia, CDr/File, EP,  2013




















1- Phosphorescence 
2- Winter Rain 
3- Whiter Than Silver 
4- Elegiac 
5- Our Silent House Is Listening 
6- Bourn Of Midnight 
7- Winter Mask 
8- Into The Dark Decayed 
9- November Dream 
10- A Voice Calls From The Hill 
11- In The Leaves    


THE LONG DUST
Malignant Records, CD, 2013




















1- Wires
2- Relic
3- Anointing 
4- Sea Of Fossils
5- Desert Buoy
6- The Long Dust 
7- Veil Of Sand 
8- Pilgrimage 
9- Red Lightning 
10- The Road
11- Dunelight 
12- The Unwept Waste    


CLOUDED
Aglaia, MP3, 2013




















1- Lay Your Shadow On The Sundials
2- Boundless
3- The Great Lights
4- Obscured
5- The Farther Off, The More I Follow Thee 
6- Press The Final Sweetness In To Wine
7- Animula 
8- The Sun Of Ghosts 
9- The Wideness Of Night Is For You   


NIGHT PRAYERS
Aglaia, MP3/FLAC, 2013




















1- Night Prayers Part 1
2- Night Prayers Part 2
3- Night Prayers Part 3
4- Night Prayers Part 4
5- Night Prayers Part 5 

 

http://caul.org/

CAUL (I)

CAUL OU LA MYSTIQUE DOULOUREUSE 
1ère PARTIE (1994-2001)  
2ème PARTIE (2002-2013)



Empreint d’un mysticisme douloureux, le travail de l’américain Brett Smith est toujours à mi chemin entre les visions éthérées issues de ses convictions, et le doute, la tristesse inhérente à toute croyance, à toute existence. Elle est l’expression de ce creux de la vague, de cet abîme, où, parfois, quelques rêves, quelque étrange espérance, arrivent à percer.

A GOLDEN EPIPHANY
(Eibon Records) 2002


Sortis presque consécutivement, « Epiphany/Fortunate », « The Golden Section » et « Whole » marquent les débuts du projet de Brett Smith. Introuvables depuis, ils sont ressortis en 2002 chez Eibon Records sous la forme d’un triple CD intitulé « The Golden Epiphany ». C’est de cette nouvelle version dont sont tirées les critiques suivantes.

EPIPHANY / FORTUNATE
(Epiphany Recordings) 1994 Cassette
(The Golden Epiphany CD1)


A Epiphany
B Fortunate

Lors de sa ressortie, le CD apparait divisé en 16 morceaux sans titres.

Dans une interview, Brett Smith considérait ces trois cassettes très proches de l’album “Crucible” qui en était une sorte de point culminant :
They're similar to what Crucible sounds like, Crucible is sort of a culmination of what I did on the 3 cassettes.(Interview réalisée par Mickael C. Lund en août 1998.)Pourtant, tout le style de CAUL transparait déjà dans cette ancienne cassette, même si certains morceaux ressemblent plus à des essais, à une expérimentation maladroite de ce que devait devenir CAUL par la suite.
Travaillant presque exclusivement avec des claviers, de longues nappes oniriques ou mystérieuses de synthés, dont quelques mélodies se dégagent, tristes, lentes, renforcées par des bruits éphémères, des souffles discrets. Témoin le second morceau qui nous plonge tout de suite dans cette atmosphère si particulière qui traverse l’œuvre de Brett Smith, cette mystique douloureuse, ces visions éthérées et tristes, parfois presque fantomatiques.
Plus étrange, « Untitled 3» est un morceau lent, utilisant comme structure une basse sourde, quelques raclements, et un curieux sample de voix mêlés de notes plutôt inquiétantes.
Certains morceaux sont plus anodins, simple recherche d’ambiances, comme « Untitled 4 » : quelques percussions et notes ; « Untitled 9 et 11 » assez monotones et « Untitled 10 » dont le début donne une idée assez précise de ce que CAUL arrivera à faire par la suite, curieux compromis entre les spires éthérées de ces œuvres futur et les tourbillons magiques de Thom Brennan.
D’autres morceaux ne sont que des mélanges diffus de notes, de mélodies qui se suivent, comme « Untitled 5 » tandis que « Untitled 6 » ressemblent plus au « brouillon » d’une œuvre futur qui prendra toute sa force à partir de « The Sound of Faith » et « Lights from many Lamps ».
Réflexion triste, pausée, « Untitled 7 » nous emporte vers quelque rêverie oscillant entre espoir et peine, mais tout cela avec un grand calme, un ton si particulier que l’on ne retrouve que rarement ailleurs. Tout aussi proche « Untitled 8 » reste dans la même atmosphère mélancolique et rêveuse.
Plus sombre et inquiétant en revanche avec ses mélodies sourdes, gutturales, « Untitled 12 » rappelle de loin en loin certains passages de Megaptera (Will You Survive this Nightmare ?) ou de Lustmord.
Retour à une mystique mélancolique, poussant à de sombres réflexions, avec « Untitled 13 ». Rythme lent, notes profondes, cloches, et quelques échos discrets.
On reste dans l’obscurité avec « Untitled 14 ». Souffles, mélodies de synthés sombres et dépressives.
Plus étrange, « Untitled 15 » avec ses multiples échos, ses curieuses notes de synthé, qui a presque quelque chose d’ethnique, d’une métaphysique extra-européenne.
Rappelant le très fantomatique « Reliquary », le dernier titre nous emmène vers un royaume de grisaille sans fin. Souffles, échos sourds, notes brumeuse et effacées qui se perdent dans l’espace.

WHOLE
(Epiphany Recordings) 1994 Cassette
(The Golden Epiphany CD2)


A Untitled
B Untitled


Lors de sa ressortie chez Eibon « Whole » apparait comme un long morceau de près de 60 min.

La première impression quant on écoute « Whole », c’est que la musique semble beaucoup plus fouillée que sur « Epiphany/Fortunate » et nettement plus industrielle aussi. Longue pièce atmosphérique, « Whole » semble même plus fouillé que le – trop ? - long « Hidden » sorti quelques années plus tard en 2001.
Tout commence par un curieux martèlement auxquels viennent s’ajouter des raclements, des souffles, des bruits perdus en échos, puis des drones industriels prennent le pas sur le reste. Tout s’enchaîne alors, devient un mélange de sonorités sombres et entremêlés de souffles et de rythmes inquiétants.
Ce début reste même étonnement proche des productions Cold Meat de l’époque, de Lustmord, de certaines cassettes de Slaughter Productions.
La seconde partie commence dans une sorte de tourbillon, de souffle de sons, qui rappelle certains passages de Die Sonne Satan ou Megaptera (samples de voix en moins pour ce dernier...).
Ce que l’on peut appeler fictivement la troisième partie (11’20), poursuit dans cet esprit de mélange de sons, de tourbillons sonores, mais de façon plus dépouillée, plus spectrale aussi : des voix, des chœurs lointains viennent hantés la musique qui n’est qu’un mélange de souffles et de notes graves, d’échos déformés de cloches, de sons qui sont plus des vibrations. Franchement inquiétant, surtout lorsque des espèces de samples bourdonnements viennent envahir l’espace sonore, replongeant l’œuvre, l’espace d’un instant, dans un contexte plus industriel. Tout se poursuit en un va-et-vient noyés de sons, d’échos, de souffles, tout aussi fantomatique. Sorte de voyage initiatique et sombre aux pays des âmes errantes.
De longues notes étirées, vibrantes, des nappes diffuses de synthés voyagent ensuite dans cet espace sonore complexe et riche. Il ne reste ensuite plus que ces harmonies étirées ou diffuses qui fluent et refluent d’un instant à l’autre, parfois aigues, parfois bourdonnantes ou fragiles.
L’hypothétique quatrième partie (26’10) débute par des notes graves, un son proche de la distorsion, qui se poursuit en drone vibrant. Moins marquant pourtant que le début du CD.
Le passage suivant (34’15) est constitué par un drone fait d’une multitude de couches de sons superposés, erratiques, fluctuants, rythmés par moments par des échos sourds, et semble assez proche de certains morceaux de Troum ou Maeror Tri. Le morceau se poursuit en une sorte d’expérimentation sonore, à la limite de la confusion, mais retrouvant malgré tout une stabilité dans ces drones tourbillonnants. De lointaines percussions viennent s’ajouter, des notes graves, mais le titre ne réussi pas vraiment à atteindre ce côté hypnotique et rituel que peuvent avoir certaines œuvres de Troum.
Plus pausée, revenant à des mélodies de synthés étirés, mais utilisant toujours ce mélange flou de couches de sons superposés, la partie suivante (43’00) ne parvient pas non plus à se hisser à la hauteur des ambiances plus industrielles ou spectrales des trente premières minutes - de loin les meilleurs.
Le CD se poursuit sur un passage plus industriel rappelant certaines boucles de Die Sonne Satan ou du projet italien (lui aussi sur Eibon Records) I Burn, et se termine sur un mélange de sons, de notes étirées, distendues, retrouvant une part de la beauté spectrale du début mais avec quelque chose de plus cristallin, de moins sombre.

THE GOLDEN SECTION
(Epiphany Recordings) 1994 Cassette
(The Golden Epiphany CD3)


A- Untitled
B -Untitled


Lors de sa ressortie, le CD apparait divisé en 12 morceaux sans titres.

Si Brett Smith ne considérait ces trois cassettes que comme les brouillons de « Crucible » on se dit à l’écoute du premier morceau « Untitled 1 » qu’il s’agit franchement d’un beau brouillon. Mélange profond, triste mais non dénué d’espoir, de notes graves, de souffles, de mélodies, ce titre est une fois de plus l’expression de la beauté trouble qui caractérise CAUL.
Assez curieux, « Untitled 2 » est un morceau planant, lent et menaçant, dont certains sons, bien que beaucoup moins typés bien sûr, semblent presque empruntés à Ennio Morricone. Mais l’ensemble reste homogène et donne l’impression d’une menace sournoise, de toucher à la conclusion d’une histoire sinistre.
Tout aussi sournois et menaçant le morceau suivant qui ne garde qu’une infime part d’espoir, délayé dans un océan de goudron et de doutes…
Beaucoup plus rythmé, le très réussi « Untitled 4 » rappelle certaines des collaborations de Brett Smith, comme Blackmouth avec Jarboe et John Bergin ou Tertium Non Data toujours avec John Bergin (Trust Obey et C17H19NO3). Idem pour le morceau suivant mais qui semble rapidement plus répétitif et lassant.
Plus anodin aussi, « Untitled 6 » qui sans être désagréable ne décolle jamais vraiment. Idem pour le morceau suivant qui reste très ambient, proche de certains morceaux de Robert Rich, Alio Die, lorsqu’ils effleurent certaines sonorités extra-européennes. Même ambiance pour « Untitled 11 » sauf que là le titre gagne rapidement en ampleur, pour aboutir à un morceau sombre, rythmé de percussions discrètes, de notes lointainement ethniques.
On retourne à une ambiance plus inquiétante avec « Untitled 8 », quoique assez basique, et le morceau « Untitled 9 » : notes distordues et mélodies noyées.
Avec « Untitled 10 » on retrouve un semblant de l’étrangeté, du mystère que CAUL arrive si bien à transcrire, ce clair-obscur désenchanté et éthéré à la fois, mais le morceau reste lui aussi trop basique, bien en-deçà du meilleur de CAUL.
L’album se termine par un morceau planant de synthé de facture plutôt classique.

CRUCIBLE
(Malignant Records) 1996




CRUCIBLE

1- Untitled
2- Aurora
3- Lysis
4- Behold
5- Reduviid
6- Cluster
7- Perfervid
8- Procession
9- Arc
10- Darkness
11- Adrift
12- Sojourn

Ethéré, fantomatique, cosmique, « Crucible » révèle toute la puissance créatrice de Brett Smith au travers de ces paysages sonores mystérieux qui sonnent d’emblée comme l’invitation à quelque voyage initiatique.
Après la courte introduction de « Untitled », on entre de plein pied dans un univers mystérieux avec « Aurora ». Des sons tourbillonnant, des tintements, des chœurs indistincts, pour le côté merveilleux, et des notes graves, des échos assourdis, qui donnent au morceau une aura fatidique. Tout ce mélange ambigu de lumière et de ténèbres.
De plus en plus mystérieux, étrange, « Lysis » poursuit cette évocation trouble de l’au-delà, d’un autre monde qui se perd dans le clair-obscur de l’âme. Ici la menace se fait plus sournoise, mais on la sent quand même, derrière les souffles, les harmonies éthérées. Pleine de beauté, de remords, de mélancolie et d’élan mystique, cette musique pourrait illustrer au cinéma de nombreuses scènes variées, de par son ambigüité, parce qu’elle est capable de susciter en nous la beauté comme la douleur. Les bons et les mauvais souvenirs.
Beau et hanté, « Behold » ouvre l’horizon de ces voix, de ces chœurs énigmatiques, de ces nappes de synthés presque désenchantées mais dont toute lumière n’est pourtant pas absente.
« Reduviid » reprend ce côté fantomatique mais en travaillant plus sur des nappes de synthés discrètes, fragiles, fluctuantes, mais tout aussi hantées. Instable comme la curieuse apparition d’un ectoplasme dans un vieux salon de thé.
A l’écoute des morceaux, on se rend compte que cette album forme un tout, qu’il y a une envoûtante unité entre les titres, comme s’ils venaient tous du même univers parallèle. Brett Smith décrit de la manière suivant le surprenant choix des titres :
« I had a list of words I liked and I organized them into an order I thought felt right and then put the songs into an order that felt right, so the songs ended with the titles by default. This is the way a lot of my stuff is done, by working with elements until it seems like it comes together. This isn't to say I think what I do is meaningless, it's just that it's guided by an outside force. »(Interview réalisée par Mickael C. Lund en août 1998.)Lent, portant sur ces accords sombres quelques menaces issues d’une bien curieuse eschatologie, « Cluster » est un morceau d’une grand profondeur, d’une puissance évocatrice envoûtante dans ces harmonies sombres, ces samples mouvant de voix, ces sonorités cristallines discrètes. Triste, intemporelle, et une fois de plus : hanté malgré sa simplicité. Vraiment réussi…
Nageant dans les mêmes eaux mystérieuses, le même océan inexploré dont toutes sortes de créatures peuvent émerger à tout instant, « Perfervid » qui porte une fois de plus en lui cette curieuse ambivalence entre lueur et obscurité.
Difficile de décrire les morceaux de cet album qui se perdent dans un flou de mélodies, de nappes, de sons éthérés et cristallins, de tourbillonnements égarées de cloches, de notes sourdes et de chœurs. Bien entendu, comme dans « Procession » il y a toujours une mélodie qui émerge des ces paysages crépusculeux, triste, lente, fatidique, qui porte le morceau hors des eaux troubles de ce mélange fascinant de sons.
Traversée d’émotions, l’œuvre de CAUL est un terrible appel à « autre chose », à un au-delà inatteignable ; elle est le constat de cette vie, de cette humanité qui cherche à fuir sa condition en des paradis artificiels et improbables. Et toute la musique en est le criant reflet comme dans « Arc», oscillant entre calme et tragédie, espoir et désespoir.
Susurrant, offrant des harmonies aigües et mauvaises, « Darkness » et d’une noirceur équivoque, comme le mal présent derrière la beauté, la noirceur habitant les profondeurs de toute âme humaine. Douce et fielleuse, cette musique invoque tout le mal qui se cache en chacun de nous, tout en restant loin, très loin, des grondements, martèlements, déchirements du dark-ambient. Fascinant et… dangereux, comme un pacte avec le diable lui-même…
« Adrift » et « Sojourn » restent dans cette ambiance mystique et hantée, triste aussi, et exprimant la beauté tragique des âmes mortes entrevus au cours d’une longue méditation solitaire.
Un très bel album et un beau voyage de plus de 70 min au pays des âmes que Brett Smith propose de temps à autre en téléchargement gratuit sur son site : http://caul.org/

THE SOUND OF FAITH
(Katyn Records) 1996


THE SOUND OF FAITH
(Epiphany Recordings) 2005



1- Kyrie
2- Somnia A Deo Missa
3- Nature and Grace
4- The Redeemer of Blood
5- Parousia
6- Sicut Ovis
7- Metempsychosis
8- The Type and Shadow of our Bodies
9- Theophany
10- Adumbratio
11- Ankou
12- A Golden Bell and a Pomegranate
13- Expurgate
14- The Seven Abominations of the Heart

Ostensiblement plus religieux dans ces titres, « The Sound of Faith » est une sorte de voyage mystique, onirique, qui se perd dans les nébuleuses intérieures du rêve, les méditations étranges et solitaires d’un ermite.
« Kyrie » est un douloureux préambule, lent, propice aux réflexions les plus noires, les plus tristes, et, curieusement, malgré le titre, malgré le mystère qui en émane - comme de l’essentiel des morceaux de l’album -, il ne semble dispenser qu’une faible et énigmatique lueur dont rien de bon ne semble pouvoir résulter.
Plus ou moins inclassable, « Somnia A Deo Missa » avec ses percussions, notes de guitares, sifflements de synthé, qui reste malgré tout un agréable interlude.
Point faible de l’album, curiosité ou clin d’œil privé, « Nature and Grace » est tout aussi inclassable, lourd de rémanences ibériques, avec guitare flamenco et synthés. Exotique, oui, mais sans âme aussi hélas contrairement aux autres titres. Mais je pense qu’il ne faut le prendre que comme une curiosité.
Heureusement, « The Redeemer of Blood » replonge dans le monde spectral de CAUL. Onirique, mystérieux, fantomatique ou éthéré, ce morceau peut être qualifié de tous ces termes, au choix, selon nos propres goûts, selon ce que chacun y voit. Lente plongée dans les profondeurs tournoyantes de lumières d’un océan inexploré… En fait, ce morceau rappelle presque le label peu connu Mystery Sea (Troum, Mathieu Ruhlmann, Sostrah Tinnitus…) explorant au travers de ces œuvres les profondeurs d’une multitude d’océans dont nous n’avons même pas idée...
« Parousia » reste dans cette même thématique, même ambiance, tournoiements de sons, voix ou synthés qui émergent de nulle part, se perdent dans les profondeurs, ou disparaissent dans le mystère d’un soleil couchant. Toujours avec ce subtil mélange d’envoutement et d’ombre qui fait que ces morceaux ne sont pas que les réflexions béates d’un mystique, mais plutôt l’expression de toute la complexité des croyances.
Court morceau, « Sicut Ovis » est une sorte de méditation profonde, traversée d’ombres, baignée de lumière…
Plus énigmatique et sombre, « Metempsychosis » et ses voix déformées, ses sons qui retombent de quelque paradis perdu, ses tourbillons spectraux de sons qui évoquent un au-delà peu amène…
Suit le très beau, mélancolique et éthéré « The Type and Shadow of our Bodies » avec ces voix, ces chœurs tristes, et ces notes de pianos soutenus ici et là par un synthé discret mais efficace.
« Theophany » est plus léger, plus aérien, mais toujours construit autour de voix, de notes tournoyantes, de reflux lointain de cloches et de scintillations…
Retour aux doutes, à l’obscurité montante avec « Adumbratio ». Notes étirées, déformées, qui s’imbriquent, changent de hauteur, montent et descendent de ton selon l’humeur, ce qui leur donnent un côté véritablement hanté et mystérieux.
Le long morceau « Ankou » sort alors des brumes pour apparaître sur un sentier menant tout droit vers un récit tiré de l’œuvre fascinante d’Anatole Le Braz. Articulé en trois parties, « Ankou » exprime à la fois le mystère, la peur, l’espoir et le désespoir lié à la mort. Mélodies se glissant comme des ombres, répétitives, lancinantes, lointains sons de cloches, échos sourds, souffles de mauvais augures marquent les deux premières parties. Certes pas le morceau le plus noir de CAUL, mais il y a en lui ce mélange de peur et de curiosité qui fascine. Etrange contraste avec la dernière partie, qui a quelque chose de moyenâgeux, rappelant les plus délicats moments de The Soil Bleeds Black. Instruments ancien (harpe), tintements cristallins, mélodie grave en contrepoint, et de curieux bruits d’animaux ou d’oiseau rappelant certains passages de la très jolie bande-son de Trevor Jones pour le chef-d’œuvre de Jim Henson : DARK CRYSTAL.
« A Golden Bell and a Pomegranate » est presque aussi moyenâgeux mais plus triste.
« Expurgate » retourne à ce souffle hanté, mélangeant les harmonies, les dispersant dans un brouillard de doutes.
« The Seven Abominations of the Heart » évolue sur un rythme lent; ces notes baignent dans une grisaille tenace, sonnent comme le dernier chapitre d’une histoire tragique.

Brett Smith met parfois en ligne cet album à télécharger gratuitement : http://caul.org/


LIGHT FROM MANY LAMPS
(Malignant Records) 1998



1- I Will Awake the Dawn
2- O Thou Bright Crown of Pearl
3- The Blood within the Veil
4- Thine is the Day, Thine is the Night
5- At Midnight I Arise to Give Thanks To Thee
6- By the Breath of God, All the Stars
7- Midnight’s Tongue
8- A Tapestry of Bone
9- The Twelth Golden Swan
10- The Mirror of Simple Souls
11- The Saint and the Seraph
12- Crux Est Mundi Medicina
13- Etuangelos
14- Penuel
15- La Sua Volontate é Nostra Pace

Second album à sortir chez Malignant, avec « Light from Many Lamps » on entre de plein pied dans la période la plus créatrice, la plus personnelle de CAUL. Et s’il est une constatation à faire, c’est que les titres sont de plus en plus mystique et religieux, mais que la musique, elle, exprime toujours le mystère, un au-delà tour à tour éthéré et fantomatique, mais qu’elle est aussi et surtout l’expression de cet instant de doute, de l’apostasie tentatrice, qui se cache derrière nos plaies, nos douleurs, derrière la lucidité. Et ce même si Brett Smith ne voit en sa musique qu'une expression de sa relation avec Dieu.
Tous aussi fascinant que « Crucible » et « The Sound of Faith », « Light from Many Lamps » gagne encore en émotion, en âme…
« I Will Awake the Dawn » sert d’introduction à l’album : vent, tintements et notes cristallines qui le conduise jusqu’au très beau « O Thou Bright Crown of Pearl » et ses nappes envoûtantes de synthés, ses mélodies tristes et belles. A la fois éthéré et sombre, on pense lointainement aux premiers Desiderii Marginis et Raison d’Être, mais ce n’est qu’une lointaine comparaison, car l’œuvre de CAUL reste toujours personnelle.
Vient ensuite le court « The Blood within the Veil ». Quelques notes de piano, un synthé éploré et aérien, qui nous transporte ailleurs.
Commençant avec le même genre de rythme lent, de basse sourde qui évoque The Moon Lay Hidden Beneath A Cloud ou Der Blutharsch, « Thine is the Day, Thine is the Night » se poursuit avec une superbe voix angélique et des synthés aériens qui forment un beau contraste avec la rythmique presque rituelle. Superbe et envoûtant.
Le morceau suivant est beaucoup plus ambiant, dégageant au travers de couches indécises, fluctuantes de synthés et de sons, une impression de malaise et de sombreur qui rappelle certain morceau hantés du précédent album.
« By the Breath of God, All the Stars » est une envolée somptueuse au synthé, pleine de grâce, de beauté, de douleur, et d’au-delà…
« Midnight’s Tongue » apparait beaucoup plus chaud, presque langoureux, lascif, avec ses mélodies de pianos et de synthés (parfois presque hispaniques dans l’esprit), ses notes flûtées, mais surtout ses samples de voix : « I can hear your heart, I can taste your mouth, I can smell your body… ».
« A Tapestry of Bone » ressemble presque à une sorte de veillée funèbre, mais au lieu d’avoir ce côté morbide, nihiliste, de certaines œuvres, on y sent un mélange d’espoir et de douleur dans les notes de synthés et l’orgue. « The Twelth Golden Swan » poursuit le morceau précédent mais en glissant lentement, progressivement, vers un mélange de sons, de nappes, beaucoup plus fantomatiques. Comme si la nuit était enfin tombée et que toutes les peurs, toutes les angoisses reprenaient le dessus. Comme si nous pouvions enfin glisser un œil par la porte entrouverte de l’au-delà et y voir les formes spectrales, les ectoplasmes dansant dans une grisaille sans fin.
« The Mirror of Simple Souls » est au confluent de la musique sacrée, du thème mystique évoquant la quête du Graal, tout en ayant quelque chose d’enjoué que l’on ne retrouve pas à ce niveau, en tout cas pas dans le reste du CD. On peut songer à The Soil Bleeds Black en moins naïf.
Autre très beau morceau, « The Saint and the Seraph » : mystérieux, cristallin, évoquant les brasillements de la lune à la surface des vitraux d’une église perdue, par une nuit calme, étrange, où l’on sent que tout peut arriver. Bien entendu toujours aussi religieux, mystique, mais fonctionnant aussi avec les esprits païens… Il suffit de s’imaginer quelque antique créature, la ligne étincelante de l’écrivain Algernon Blackwood, les êtres féeriques de Lord Dunsany, voire le petit peuple d’Arthur Machen, car le morceau se termine sur une note beaucoup plus sombre.
Tout aussi beau, merveilleux, « Crux Est Mundi Medicina » et ses harmonies enchanteresses, ses voix profondes et envoûtantes, oui, une fois de plus, même si l’on reste éloigné de la religion, ce titre peut évoquer la beauté de la nature, les mystères de l’âme humaine – pour ceux qui en ont une et ils semblent de plus en plus rares…
Echos de voix mourantes, pleurs ou rires d’enfants, au début « Etuangelos » se poursuit en nappes pénombreuses dont émanent malgré tout une certaine lumière intérieure. « Penuel » prolonge le morceau, gardant les mêmes harmonies douces et tristes, avec des notes de pianos,
Le tout distillant toujours cette terrible mélancolie doucereuse, cette nostalgie et cet élancement de l’âme qui renvoie chacun à ses souvenirs les plus forts.
D’une tristesse éthérée, d’une mélancolie gracieuse, « La Sua Volontate é Nostra Pace » termine en beauté ce superbe CD voué aux âmes errantes, aux esprits solitaires et désenchantés, à ceux dont les réflexions les mènent de la recherche de beauté aux désespoirs de l’abîme. Et le vent revient à la fin du morceau, emportant avec lui une part de nous-mêmes.
Une très grande œuvre…

RELIQUARY
(Eibon Records) 1998



1- Christ Altogether Lovely
2- Paliggenesia
3- The Measure of the Stature of the Fullness of Christ
4- A Sigh is the Sword of an Angel
5- The Soul Rising out of the Vanity of Time
6- Et In Arcadia Ego
7- Lights in the Firmament of Heaven
8- A Golden and Blessed Casket of Nature’s Marvels
9- The Mystery of the Seven Stars
10- Sangre
11- The Spirit and the Bride
12- Wholeness in the Cathedral of Gold
13- The Spirit of Man is the Lamp of Lord

Mélodie de piano, notes cristallines, nappes de sons brumeuses et mélodies tristes et christiques… « Christ Altogether Lovely » ouvre la cérémonie.
N’oublions pas que d’après Brett Smith : "CAUL is a musical expression of my faith and my relationship with God”Etrange renaissance avec « Paliggenesia » qui commence de façon très dépouillée, presque inquiétante, pour s’éveiller en boucles de sons lancinants, énigmatiques, et en échos sourds.
Avec « The Measure of the Stature of the Fullness of Christ » on comprend que « Reliquary » sera moins lumineux que « Light from Many Lamps », d’un mysticisme plus hermétique, plus abscons, tourné vers de sombres méditations. Lent, pausée, presque funèbre de part son rythme, ce morceau est l’expression grave et profonde des convictions, des visions mystiques de son auteur. Et il s’en dégage une terrible impression de veillée funèbre, un mélange contradictoire de souffrance et de certitudes.
« A Sigh is the Sword of an Angel » semble d’emblée plus torturé et sombre que ce à quoi CAUL nous a habitué, puis un rythme plus léger, des harmonies plus sereines, font leur apparitions au milieu des notes angoissées qui surnagent encore ici et là, mais tendent à disparaître. Et le morceau s’illumine d’une certaine beauté intérieure qui ne lasse jamais dans l’œuvre de Brett Smith.
Soudainement hanté, inquiétant, « The Soul Rising out of the Vanity of Time » émerge de la brume tenace des époques révolues, du temps qui avancent et fauchent les esprits vaniteux, et tout devient obscur, noir comme les esprits des hommes, ténébreux comme ce monde de souffrance où leur âme semble évoluer. Tout se fait souffles, échos perdus, les mélodies, les sons se dissolvent dans cette grisaille éternelle.
Tout aussi brumeux et trouble, au moins au début, « Et In Arcadia Ego » entre en scène, mais il exprime cette grisaille spectrale de façon différente, au travers de nappes douloureuses, de tintements discrets, qui gagnent en lumière à mesure que le morceau avance, lui donnant se périlleux équilibre entre lueur et ténèbres si proche de l’esprit de CAUL.
Baignant toujours dans ce mélange trouble de sons évanescents, débute le très beau, « Lights in the Firmament of Heaven » dont percent quelques voix ténues jusqu’à ce que la lumière déchire le voile des ténèbres et libère l’espace de ses voix envoutantes, des ses nappes éthérées. Et comme toutes les croyances, les religions qui veulent nous apporter la lumière ont plus vite fait de nous plonger dans les ténèbres de l’obscurantisme, de l’aveuglement et du fanatisme, ou en tout cas de rejeter dans le néant ce que nous sommes vraiment, notre identité profonde, notre capacité à réfléchir, ce morceau porte aussi en lui une part d’ombre.
« A Golden and Blessed Casket of Nature’s Marvels » est plus discret, morceau à l’atmosphère trouble, distillant avec parcimonie une faible lueur dans un océan de grisaille, contrastant avec le rythme lourd, les synthés cérémonieux de « The Mystery of the Seven Stars ». Toujours aussi ambigüe : religieux mais d’une beauté profane…
« Sangre » ouvre ensuite la danse, retournant à ce goût de Brett Smith pour les sons hispanisants.
Malgré ses lointains échos industriels, « The Spirit and the Bride » reste empreint d’une religiosité calme, poétique, épurée de toute souillure.
« Wholeness in the Cathedral of Gold » est une courte pièce de musique sacrée, mêlant orgue et synthés.
« The Spirit of Man is the Lamp of Lord » conclut cet album sur une note plutôt enjoué.

HIDDEN
(Eibon Records) 2001


1- Hidden

« Hidden » est un long morceau de 59’35 minutes. Comme « Whole », il commence sur un mélange de drones, de sons étirés jusqu’à ne plus former que des souffles, des sifflements inquiétants, et dont quelques voix, quelques notes et grondements émergent par moments. Apparemment plus sombre, plus industriel aussi que les CD auxquels CAUL nous habituait, des mélodies lumineuses viennent malgré tout apporter une note religieuse, mystique, au morceau, avant de disparaître rapidement, de se fondre dans de lointaines sonorités, presque spectrales, diffuses, et des remous industriels de sons tout aussi discrets.
Les couches de sons s’ajoutent les unes aux autres, stridulations, voix à peine audibles, remous inquiétants, drones discrets. On pense un peu à Lull dans la – trop grande ? – discrétion de ces compositions. Il y a une richesse, une variété des sons, mais on regrette assez rapidement qu’elle ne soit pas davantage mises en valeur. C’est bien entendu délibéré, « Hidden » étant une œuvre discrète, introvertie, tournée vers la réflexion. Une longue méditation, triste, et parfois traversée de lueurs indécises. Caché, tout simplement…
« Hidden » cherche la part de mystère, la vérité qui se cache en toute chose, et c’est un long cheminement, une lente alchimie de l’esprit et des croyances, qui peut être douloureuse, longue et triste, comme cet album.
Il faut monter le son pour percevoir toutes les subtilités de la musique, pour se laisser gagner par ces ambiances grises, pleines de souffles, de stridulations évanescentes, de grondements discrets, d’échos feutrés et de mélodies se perdant dans la brume. La lumière semble revenir un instant, vers la fin, se glisser lentement à l’horizon, formant de discrètes taches dans sur toute cette grisaille, puis tout sombre dans les drones chtoniens.
Malgré sa longueur, la discrétion de ces ambiances, « Hidden » reste malgré tout un album intéressant même s’il faut reconnaître que, en dépit de sa richesse, il est beaucoup moins envoûtant que les précédents et se glisse peu à peu dans une certaine « routine ».

A noter une interview donnée par Brett Smith à Last Sigh en 1998 :


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