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...musiques obscures, funèbres, oniriques et dépressives ...
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DARK, BLACK AND HAUNTED SOUNDSCAPES

DARK, BLACK AND HAUNTED SOUNDSCAPES
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LOSCIL

CALME TRISTESSE
PART 1 : 2002/2010



















Si l’on semble ici s’éloigner des berges tourmentées du dark-ambient avec le projet de Scott Morgan, LOSCIL, c’est pour mieux explorer cette lisière qui se tient, fragile, entre les ténèbres de la forêt profonde et, de l’autre côté, l’ondoiement des collines baignées par la lueur irisée du couchant. Jamais désespérée, jamais enjouée, l’œuvre de LOSCIL évolue dans cette sorte d’entre-deux vaporeux, cherchant à saisir un instant, le reflet d’une lueur ténue, l’ondoiement imprécis de soleil à la surface miroitante d’un lac, d’une vitre, où se reflète le gris songeur d’un horizon voilé…

SUBMERS
Kranky 2002


















1- Argonaut I
2- Gymnote
3- Mute
4- Nautilus
5- Diable Marin
6- Resurgam
7- Le Plongeur
8- Triton
9- Kursk

SUBMERS est le second CD de LOSCIL à sortir, après TRIPLE POINT, chez Kranky.

Lent et onirique, méditatif et nostalgique, à l’écoute de SUBMERS, on songe à certaines œuvres du regretté duo Celer, à Lähtö, Keith Fullerton Whitman, Jannick Schou, et bien d’autres, sans pour autant s’en rapprocher réellement.
Synthés ondoyants, vibrants, « Argonaut 1 » ouvre cette étrange ballet de reflets éphémères qu’est SUBMERS.
Des quelques discrets éléments d’electronica de « Gymnote », on passe aux pulsations souterraines de « Mute » avant d’arriver au trouble et évanescent « Nautilus », fait de remous, de curieuses réfractions sonores, perturbées par des rythmes à la mécanique discrète. On songe une fois de plus au lointain reflet de la pochette, discret, insaisissable…
Arpèges noyés en des réverbérations tournoyantes pour le jolie « Diable Marin » structurés par des rythmes électroniques tout aussi discrets.
Viennent ensuite le mystérieux « Resurgam » et le d’abord lent et hypnotique « Le Plongeur », qui gagne rapidement en rythme, en échos, en ondoiements sonores.
« Triton » est sans doute le meilleur titre de l’album, mêlant avec cette douceur si particulière à LOSCIL, des éléments d’électroacoustique, sobrement teinté d’électronique, à des plages ambiantes pleine de remous mesurés.
Et s’il y avait jusque là une certaine nostalgie dans le propos, une tristesse imprécise qui s’attardait ici et là, on termine sur une note plus sombre, avec « Kursk », lente et triste montée chromatique.
Et même si d’autres artistes, au hasard de leur discographie fournie (Aidan Baker, Tim Hecker, Fennesz, Celer…) ont parfois fait mieux, cet album est pour ceux dont le lointain reflet du soleil, à la surface des eaux troubles d’un lac, d’une lagune, sert de point de départ à de curieuses et incessantes méditations.

FIRST NARROWS
Kranky 2004


















1- Sickbay
2- Lucy Dub
3- First Narrows
4- Ema
5- Mode
6- Brittle
7- Cloister

Doucereux, triste, discret, FIRST NARROWS est une succession de souvenirs étranges, sans réelle importance, figés en quelques brume intérieure, mais qui sont toujours là, quelque part en nous.
Alternant titres plus ambiants à ceux ou l’ambiante se pare d’éléments électronique minimaliste et épurés, FIRST NARROWS se révèle malgré tout plus électronique que son prédécesseur. Les vagues étirées de sons, de synthés, venant souvent en contrepoint de rythmes, toujours discrets, mais plus présents que par le passé.
Aucun titre ne se dégage vraiment de FIRST NARROWS, l’ensemble garde ce côté rêveur, à la fois contemplatif et nostalgique, et les morceaux s’étirent lentement, parfois assez fades, comme « Lucy Dub » ou « First Narrows », et à d’autres moments les ambiances fonctionnent : la douce rêverie de « Britlle » ou le doux-amer « Ema » qui plonge l’esprit dans une rêverie pleine de nostalgie, de souvenirs baignés de notes brumeuses de guitares, de synthés vaporeux et perdus en quelques réminiscences lointaines…
Plus en retrait de nouveau, « Sickbay » ou « Mode », et leur mélange d’arpèges électroniques et de sons planants, agréables, presque atonaux, volontairement discrets, qui cherchent à figer ces instants que l’on croit sans importance – un geste, un reflet de soleil au hasard d’une promenade, un regard, mais qui n’atteignent jamais - hélas – ce que l’on pourrait souhaiter d’un tel album, ou, à tout le moins, cette espèce de lointain scintillement sonore, à la fois méditatif et nostalgique, que le dernier titre, « Cloister », parvient à créer.
FIRST NARROWS est un album en demi-teinte, sans doute trop discret, qui ne parvient pas suffisamment à éveiller l’attention de l’auditeur, dommage, car il y a malgré tout de bons moments dans cet album.

PLUME
Kranky 2006



















1-Motoc
2-Rorschach
3-Zephyr
4-Steam
5-Chinook
6-Bellows
7-Halcyon
8-Charlie
9-Mistral

D’une douceur électronique et ambiante, à la fois porteur de rêveries, de langueur mélancolique, PLUME renoue avec la beauté hypnotique de SUBMERS. Bien entendu, les morceaux n’ont pas le côté « ondoyant » propre à ce dernier, mais la calme magie que Scott Morgan arrive à donner à certain de ces titres, fonctionne ici sur l’ensemble de l’album…
Du paisible et fragile « Motoc », au rythme discret, aux arpèges doux, émaillés ici et là de notes cristallines, au lent et rêveur « Zephyr » ou au plus lumineux et entêtant « Chinook », PLUME est une collection de morceaux discrets et calmes, comme Scott Morgan aime à en créer, et au-delà de ces bribes fragiles de souvenirs volés au passé, d’évocations douces et rêveuses, se dégage une tenace impression de survoler des paysages baignés par les lueurs iridescentes du couchant, un calme soir d’automne, comme si l’on suivait certains de ces vents, évoqués dans PLUME, au travers de leur périple millénaires.
Bien entendu, chacun verra, ressentira, imaginera ce qu’il souhaite dans les arpèges et l’électronique suave de « Charlie » ou de « Mistral », (comme de tous les titres de l’album), de paysages scintillants et vallonnés, au souvenir le plus secret, porteur d’affect positif, autant que d’une trouble tristesse. D’ailleurs, « Rorschach » pourrait servir de titre à bon nombre de morceaux ambiants…
Certes PLUME n’apporte aucune innovation à un courant ambiant qui peine parfois à se renouveler, il ne faut attendre de cet album aucune surprise, aucune prise de risque, comme dans les albums expérimentaux et audacieux de Fennesz ou de Tim Hecker, mais, une fois encore, PLUME est l’évocation d’une calme soirée d’automne, passé devant sa fenêtre ouverte, à rester là, pensif, laissant un flot irrésistible de pensées entrer par les battants ouverts, et çà, c’est déjà une sacrée réussite…

STASES
One 2006




















1- Cotom
2- Nautical2
3- Sous-marin
4- Biced
5- Still Upon The Ocean Floor
6- Subaquatic
7- Resurgence
8- B15-A
9- Micro Hydro
10- Windless
11- Faint Liquid
12- Stratus

Plus neutre, minimaliste et ambiant que d’habitude, STASES n’est sans doute pas le meilleur album pour découvrir l’œuvre de Scott Morgan ; dommage car cet album est proposé en téléchargement libre sur le site du net label One.
On commence par le très anodin « Cotom » qui ne se différencie en rien de nombre d’autres productions ; on pense notamment aux travaux les plus fades d’Oöphoi, à « Objectlessness » de Troum, ou de façon plus générale à toutes les œuvres les moins marquantes de la scène ambiantes…
On espère alors retrouver un peu de la magie de SUBMERS avec des titres à consonances marines comme « Nautical2 », « Sous-Marin », « Subaquatic » etc… mais il n’en est rien. Les morceaux ne se départissent jamais de cette ambiante minimaliste, de notes étirées sans fin, brumeuses, aux évolutions, involutions, lentes.
Peut-être est-ce le format mp3 qui fait perdre de la richesse à cet album, mais je n’en suis pas convaincu… Il s’agit sans doute d’une volonté délibérée de la part de Scott Morgan, de créer une œuvre épurée, minimale, qui ne s’égare pas en fioritures. Dans ce cas, c’est réussi, mais il manque à STASES ce petit quelque chose qui fait glisser une œuvre ambiante de l’ennui à l’envoûtement.

http://one.dot9.ca/2/releases.php?id=027

STRATHCONA VARIATIONS
Ghostly International 2009











1- Strathcona
2- Union Dusk
3- Midnight on Princess

Plus sombre, plus menaçant que ce à quoi LOSCIL nous avait habitué jusque là, le premier titre « Strathcona » revêt un côté nocturne et presque douloureux dans ces notes brumeuses, crépusculaires, qui s’étirent sur un paysages brouillé et opaque. Passées les deux trois premières minutes, le titre fonctionne plutôt bien, et les vagues répétitives de sons, les mélopées bourdonnantes, les harmonies nocturnes en deviennent presque entêtantes.
En revanche, «Union Dusk » renoue avec ce mélange ambiant/électronique discret que l’on retrouve, notamment, sur FIRST NARROWS, et même s’il n’atteint pas la puissance des titres les plus fortement évocateur de LOSCIL, ce second morceau trouve dans ces mélodies répétitives et ce mélanges d’arpèges électroniques, une certaine beauté.
On retourne à un titre purement ambiant avec « Midnight on Princess », méditatif, sombre, dépouillé, fait de notes étirées de synthés, mais malheureusement plus faible que « Strathcona », dont il semble n’être qu’une sorte de « brouillon » dépouillé.

ENDLESS FALLS
Kranky 2010

1-Endless Falls
2-Estuarine
3-Shallow Water Blackout
4-Dub For Cascadia
5-Fern And Robin
6-Lake Orchard
7-Showers Of Ink
8-The Making Of Grief Point

La pluie qui intervient au début et à la fin du CD donne tout de suite la tonalité d’ENDLESS FALLS : cet album est la bande son d’une longue journée de pluie. Intemporel, calme, d’une grisaille bercée de lointaines lueurs, cet album, loin des évocations pluvieuses et tourmentées d’Invercauld avec « Stormy Night » ou du sublime « Tiamhaidh », reste, à son habitude, d’une douce tristesse.
Certes il pleut, les rues, les collines se noient en une sorte de lavis brouillées de formes, la vie, elle-même, disparait en un flou taché de gouttelettes qui glissent inlassablement le long des vitres, entraînant nos problèmes, nos joies, nos envies, et nous laissant presque vide d’émotions.
Et si ce genre de temps incite à une certaine mélancolie, c’est plus une sorte de contemplation mi-nostalgique mi-rêveuse, presque détaché qui s’impose à nous, comme si, soudainement noyée, la réalité perdait de sa consistance, de son importance, comme si tout se détachait de nous avec la douceur d’un rêve, du sommeil qui nous engourdit…
Là aussi, pas d’audace dans le propos, comme toujours chez LOSCIL, mais comme souvent aussi une certaine forme d’alchimie rare, fragile, du propos, qui fonctionnera chez certains auditeurs tout en en laissant d’autre de marbre. Et pour ces derniers, ENDLESS FALLS ne sera qu'un énième album ambiant.
Prenons la peine de citer certains titres, les très nostalgique « Estuarine » et « Shallow Water Blackout », le trouble et fatidique « Lake Orchard » ou le plus lent et méditatif « Showers Of Ink ». Terminons, ou plutôt commençons, par le plus douloureux « Endless Falls ».
S’il y a un grand vide en vous : ni joie, ni douleur ; si vous ne désirez rien d’autre que de regarder la pluie tomber par la fenêtre, alors ENDLESS FALLS saura vous toucher.

VERSIONS
MP3/FLAC, 2010

                              
1-Emma
2-Estuarine
3-The Making Of Grief Point (Instrumental)

Voici donc trois « Versions » légèrement plus courtes de morceaux déjà présents sur d’autres albums.
FIRST NARROWS pour "Ema" ou "Emma" et ENDLESS FALLS pour les deux derniers titres.
Choix plutôt judicieux pour cet album proposé en téléchargement uniquement, car les morceaux sont tous les trois générateurs des ambiances si particulière à LOSCIL.
A noter que la version instrumentale de « The Making Of Grief Point » en devient, ainsi dépouillée de sa voix, de la pluie, beaucoup plus onirique. Un peu à la manière de certaines BO de Clint Mansell (Requiem for a Dream ; The Fountain).

http://loscil.bandcamp.com/album/versions